Le programme national de dépistage du cancer colorectal

Le cancer colorectal fait partie des cancers les plus fréquents (3e rang chez l’homme et 2e chez la femme) et représente la 2e cause de décès par cancer. Il touche chaque année plus de 47 000 personnes et cause environ 17 000 décès. Dans plus de 80 % des cas, il provient d’une tumeur bénigne qui évolue lentement et finit par devenir cancéreuse.

S'il est détecté à un stade précoce (in situ ou stade 1), le taux de survie à 5 ans est de 90 %, alors qu'il n'est que de 14,3 % en présence de métastases (SEER 2018).

Le cancer colorectal survient majoritairement après 50 ans (5 % de cas de cancers colorectaux avant cet âge).

Organisation du dépistage

Pour répondre aux enjeux de qualité et de participation des dépistages organisés, un nouveau dispositif d’invitation est déployé depuis janvier 2024 sous la responsabilité de la Caisse nationale d’Assurance Maladie (CNAM). Elle impulse et coordonne désormais la stratégie et le déploiement des invitations des trois programmes nationaux de dépistages organisés et leurs relances. Pour cela, la CNAM s’appuie sur son savoir-faire et son expérience en matière d’exploitation des bases de données et de contact avec les assurées selon plusieurs modalités (courrier, mail, SMS), afin qu’elles ne manquent pas l’information et évitent de l’oublier. En cas de perte de l’invitation, l’assurée peut se rapprocher de sa CPAM de rattachement afin que celle-ci la réédite.

Les Centres régionaux de coordination des dépistages des cancers (CRCDC) sont chargés du suivi des populations participantes à l’échelle de la région, en appui des Agences régionales de santé (ARS).

Invitation au dépistage

Tous les 2 ans, les personnes de 50 à 74 ans reçoivent une invitation de leur CPAM de rattachement à réaliser un test de dépistage du cancer colorectal. Les CPAM relancent les personnes n’ayant pas réalisé le test de dépistage, une première fois, jusqu’à 5 mois après l’invitation et une seconde fois jusqu’à 12 mois après l’invitation. Dans le cas où une personne aurait participé à l’une des trois dernières campagnes, cette seconde relance est accompagnée d’un test de dépistage.

Toute personne est en droit de refuser de participer à ce dépistage : elle doit le notifier à sa CPAM en retournant l'invitation complétée ou en le contactant.

Les personnes peuvent désormais se procurer le test de dépistage :

• chez leur médecin ou leur pharmacien ;
• en le commandant sur le site monkit.depistage-colorectal.fr

Si votre patient n'a pas reçu son invitation, il peut s'adresser à sa CPAM de rattachement pour en obtenir une, ou venir en consultation sans invitation.

Commande du test de dépistage

Les médecins et les pharmaciens peuvent commander directement sur leur espace professionnel sur le site ameli.fr. Le délai de livraison est de 15 jours ouvrés.

• Pour les médecins : la fiche d’identification présente dans le kit de dépistage sera ainsi identifiée à vos coordonnées pour la réception des résultats des tests. Vous pouvez également remplir manuellement la fiche d’identification ou y apposer un tampon.
• Pour les pharmaciens : la fiche d’identification présente dans le kit de dépistage sera vierge. Vous devrez indiquer à la personne de remplir manuellement les coordonnées de son médecin dans la partie dédiée.

Avant de remettre le test de dépistage à votre patient, vérifiez bien la date de péremption présente sur l'enveloppe bleue du kit et sur le tube afin de ne pas remettre des tests périmés. 

Déroulement du dépistage organisé : une stratégie en deux temps

Le programme de dépistage organisé se déroule en deux temps :

• un test immunologique de recherche de sang occulte dans les selles pour toutes les personnes éligibles ;
• une coloscopie pour les personnes ayant un résultat positif.

Les personnes peuvent désormais se procurer le kit de dépistage :

• chez leur médecin (généraliste, gynécologue, gastroentérologue), avec ou sans invitation ;
• chez leur pharmacien, avec ou sans invitation ;
• en le commandant sur le site monkit.depistage-colorectal.fr, uniquement avec une invitation.

Le test immunologique

Votre patient prélève chez lui un échantillon de selles et l'envoie au laboratoire indiqué sur l’enveloppe de retour.

Vous pouvez recevoir les résultats de vos patients soit de façon dématérialisée soit par courrier.

• Résultat négatif (96 % des cas) : votre patient reçoit son résultat par courrier, dans un délai de 15 jours ouvrés, ou via le site resultat-depistage.fr. Vous l'inviterez à renouveler ce test 2 ans plus tard, et à revenir en consultation sans attendre ce délai s'il présente des symptômes pouvant évoquer un cancer colorectal. Un « cancer de l'intervalle » diagnostiqué chez une personne qui participe régulièrement au programme de dépistage est de meilleur pronostic que chez un patient qui n'y prend pas part.
• Résultat positif (4 % des cas) : vous recevrez le résultat en avant votre patient. Informez-en votre patient et adressez-le rapidement à un gastroentérologue pour réaliser une coloscopie.

La coloscopie, en cas de résultat positif au test

La coloscopie est l'examen de référence dans le cadre du dépistage du cancer colorectal. Elle est pratiquée par un gastroentérologue assisté d'un médecin anesthésiste. Elle permet d'identifier la cause du saignement repéré par le test mais aussi, le cas échéant, de retirer d'éventuels polypes avant qu'ils ne se transforment en cancers.

Dans plus de la moitié des cas, la coloscopie ne décèle aucune anomalie. Elle détecte un polype dans 30 à 40 % des cas et un cancer dans 8 % des cas. La coloscopie nécessite une anesthésie générale ou locorégionale, avec les aléas inhérents à toute forme d'anesthésie. Il convient donc de discuter avec vos patients, au cas par cas, de la balance bénéfice-risque d'un dépistage par coloscopie après l'âge de 74 ans.

Bénéfices et risques du dépistage

• Un dépistage régulier permet de détecter et de traiter des lésions précancéreuses (adénomes à haut risque de transformation maligne) avant qu'elles n'évoluent vers un cancer ;
• Les cancers colorectaux sont détectés à un stade plus précoce. Les traitements sont moins lourds et les chances de guérison plus importantes ;
• Ce programme contribue à l'amélioration de la qualité des pratiques de dépistage et à la lutte contre les inégalités de santé. 

Avec une sensibilité supérieure et une spécificité équivalente du test immunologique par rapport à l'ancien test de dépistage, les risques de faux positifs et de faux négatifs, même s'ils existent, sont plus faibles. Ils sont de l'ordre de 0,15 % pour les faux négatifs et de 4 % pour les faux positifs.

Les risques liés à la coloscopie

Le risque de complications graves liées à la réalisation d'une coloscopie, comme une hémorragie ou une perforation de la paroi du côlon ou du rectum, est de l'ordre de 1 à 4,5 pour 1 000 coloscopies. Le risque de décès est estimé entre 1/18 000 et 1/10 000 coloscopies. S'y ajoutent les aléas inhérents à tout acte nécessitant une anesthésie. 

Favoriser l'adhésion de la population ciblée par le dépistage organisé

Malgré un test qui a fait la preuve de sa fiabilité et de ses performances dans la détection des cancers à un stade précoce et des lésions précancéreuses, la population cible du dépistage organisé, à savoir 17,7 millions de personnes, reste encore trop peu nombreuse à participer.

En effet, selon Santé publique France le taux de participation est de 34,2 % sur la période 2022-2023. Ce taux reste en-dessous des recommandations européennes d’un seuil minimum de 45 %. La participation est plus élevée chez les femmes (35,4 %) que chez les hommes (32,8 %) et augmente avec l’âge, tous sexes confondus. 

Sur la période 2018-2019, 11 235 cancers colorectaux et 48 370 adénomes avancés ont été détectés grâce au programme.

La mobilisation des professionnels de santé est déterminante pour informer et sensibiliser leur patient sur l'intérêt majeur de ce dépistage. C’est à l’occasion d’une consultation que vous pouvez aborder le sujet, s’assurer que votre patient est bien éligible au test et lui remettre le test de dépistage. La relation de confiance que vous avez établie avec votre patient favorise l’échange sur cette mesure de prévention insuffisamment ancrée dans les pratiques de la population. Veiller à ce que le patient soit bien informé et comprenne les enjeux de ce dépistage sont des facteurs pouvant favoriser sa participation.

Par ailleurs, plusieurs études épidémiologiques ont permis d'identifier des freins à la participation de la population ciblée par le programme de dépistage organisé :

• un manque de sensibilisation : la personne ne se sent pas concernée par ce cancer ;
• une méconnaissance des procédures de dépistage ;
• une gêne à l'égard de la localisation de ce cancer : le côlon et le rectum représentent un sujet tabou ;
• une gêne provoquée par le fait de devoir manipuler ses selles ;
• la peur d'un résultat positif ;
• la peur de la coloscopie ;
• la réalisation d'un ou plusieurs tests de dépistage revenus négatifs : phénomène de lassitude ;
• des facteurs d'inégalités inhérents au niveau d'éducation et à la catégorie socioprofessionnelle : personnes les plus éloignées du système de soins, migrantes ou en situation de précarité.

Si votre patient est réticent à faire le test :

• examiner ses réticences concernant ce dépistage ;
• identifier ses connaissances et adapter votre discours en conséquence ;
• l'aider à faire une balance décisionnelle en lui délivrant une information complète et loyale ;
• insister sur les apports du test immunologique : plus simple, plus fiable, plus performant ;
• attendre son approbation pour lui délivrer les informations techniques sur ce test ;
• s'assurer de la bonne compréhension des informations et du mode d'emploi.

Textes de référence